Portrait
Rendez-vous avec Jean-Baptiste Murcia des Cafés Ximun !
Avec un père torréfacteur, Jean-Baptiste Murcia baigne dans le monde du café depuis son plus jeune âge. Il en découvre la réalité en allant à la rencontre des producteurs, dans les plus belles fermes du Salvador et du Nicaragua. À son retour en France, il travaille pour son père avant de rejoindre l’équipe de Terres de Café, à Paris. Mais, si l’idée lui trottait déjà dans la tête, l’épidémie de Covid précipite son retour en famille, au Pays Basque. Et, c’est peu dire que le nouveau torréfacteur des Cafés Ximun était déjà riche d’une sacrée expérience!
Bonjour Jean-Baptiste, quelle est l’histoire des cafés Ximun ?
L’histoire des cafés Ximun démarre en 78, avec Jacques Simon. Quand mon père arrive au Pays Basque dans les années 90, il est d’abord client. Et, en 2001, Jacques Simon lui dit qu’il part à la retraite. Mon père a eu l’idée de reprendre les cafés Ximun. La curiosité de mon père a été d’acheter rapidement de bons cafés. Il a fait partie des premiers à acheter les fameux Blue Mountain, par exemple. Mon père faisait une quinzaine de tonnes à l’époque, surtout avec les cafés, hôtels et restaurants et malgré tout, il achetait des cafés assez sympas pour l’époque.
À ce moment-là, t’intéresses-tu déjà au café ?
Je vois mon père travailler avec un petit torréfacteur de trois kilos et quand je peux, je passe la journée avec lui. Je bois du café très jeune, et j’aime bien le goût, mais j’entre vraiment dans l’univers du café à mes 18 ans. Lors d’un salon organisé par le Comité Français du Café, aujourd’hui le Collectif Café, à Bordeaux, je rencontre le producteur Emilio Lopez, du Salvador, grâce à Belco. Il venait faire découvrir des expérimentations de fermentation, des process et des variétés. C’est dix tasses de café, dix goûts différents. À partir de là, une discussion commence…
Et tu pars au Salvador ?
Pas tout de suite, parce que le pays est bloqué, c’est trop dangereux. On est en 2015. Je demande alors à Alexandre Bellangé, de Belco, de me conseiller une autre ferme. Il me dirige vers une coopérative au Costa Rica, dans laquelle je passe quatre mois et demi. C’est ça, mon premier pas dans le café. Je travaille dans la coopérative, avec les producteurs qui apportent chaque matin le fruit de leur récolte. Et, je découvre l’univers de la torréfaction sur un petit torréfacteur, sans gestion d’air flow, sans gestion du gaz, sans aucune donnée. Je comprends vite qu’il y a certaines fois où l’on cuppe des cafés mal torréfiés. Par contre, je goûte tout : pas bon, bien torréfié, mal torréfié, pas assez cuit, trop cuit, vraiment tout… En même temps, je regarde ce qui se fait ailleurs pour que la torréfaction devienne béton. Parce qu’un même café, torréfié différemment, on pouvait passer à côté de quelque chose. Après ça, Alexandre Bellangé me propose de suivre Angel Barrera, Directeur du sourcing chez Belco, au Panama, au Nicaragua puis au Salvador. Au Nicaragua, je rencontre Olman Valladarez. Le Salvador s’est détendu, tout va un peu mieux. J’y rencontre Mauricio Sallaveria, je vais dans la ferme du père d’Angel, je revois Emilio Lopez. C’est avec Emilio que je rentre dans le côté chimie et expérimental du café, avec tout un tas d’outils pour le contrôle qualité.
Quand tu rentres en France, c’est donc décidé, tu seras torréfacteur ?
Oui, je vais chez Belco, chez Maxi Coffee, je torréfie aussi avec mon père pendant la saison touristique. J’achetais du café toute la semaine, partout en France. J’échangeais avec les torréfacteurs pour comprendre comment ils avaient torréfié leurs cafés, les provenances, les process, les origines.
Avec ton père, tu commences par changer des choses ou tu t’inscris dans la continuité ?
On fait des changements sur le torréfacteur pour être plus précis, on teste des torréfactions plus light qui font ressortir l’acidité, le fruit. Ce n’était pas encore dans l’air du temps. On avait une clientèle fidèle et habituée à des goûts plus cuits, plus toastés, moins aromatiques si tu veux.
Tout ce que tu as pu faire ensuite chez Terres de Café ?
C’est vrai. Chez Terres de Café, j’ai vu la torréfaction à grosse échelle. Avec des baristas qui font des championnats, mais aussi des boutiques où je dois assurer la continuité avec les clients. C’était génial ! En même temps, j’avais aussi l’idée de rentrer à Bayonne, pour que tout ce que j’avais appris serve aussi les intérêts familiaux.
Aujourd’hui, qu’est-ce qui a changé pour les cafés Ximun ?
Ce qui a changé, c’est la connaissance des produits, et l’expérience pour l’expliquer. Aussi, la torréfaction a drastiquement changé. On a changé de torréfacteur pour un Loring. Ce qui est drôle, c’est qu’on continue d’acheter à peu près les mêmes types de cafés, avec quelques micro lots en plus, pour se faire plaisir.
Globalement, qu’est-ce que vos clients aiment ?
On a un bel Éthiopie nature qui cartonne. Les clients aiment aussi les cafés avec un peu d’acidité, comme ceux de chez Olman, chocolatés avec un peu d’acidité, assez ronds, équilibrés. Tu as aussi des blends, comme le Belharra qui est le café historique de Ximun, ou Pura Vida qui est un café qu’on a voulu le mieux fait possible. C’est-à-dire un café en bio, en agroforesterie, venu à la voile depuis la Colombie. C’est tous les beaux projets en un blend vif et gourmand ! Notre clientèle, c’est de l’espresso à 99 %, parce qu’on s’adresse à des cafés, des hôtels, des restaurants.
S’il y avait un seul conseil à retenir pour bien réussir son espresso ?
Nettoyez votre machine ! Mes formations, c’est de l’hygiène. Une fois que le client a compris que l’hygiène est primordiale, il peut commencer à sortir de bons cafés. On passe toutes les semaines chez nos clients et on règle les machines. Réussir des cafés, c’est aussi s’équiper, savoir l’importance des produits que l’on achète, l’importance de l’eau à l’origine de plus de 90 % des pannes d’une machine à café, mais aussi d’un meilleur espresso !
Comment tu vois la suite pour les cafés Ximun ?
L’année dernière, on s’est focus sur le Nicaragua, en nouant de vrais partenariats avec les producteurs. C’est un vrai souhait dans les années à venir de faire pareil en Éthiopie, au Brésil et dans les pays avec lesquels on va vouloir travailler : aller au contact des coopératives, des producteurs et de s’assurer des qualités qu’on a en plus des volumes. On viendra au particulier, mais chaque chose en son temps. On a passé une période qui n’était pas facile, où il fallait plutôt assurer son business que de faire du développement. Mais l’avenir est bon pour les gens qui font du café et qui le font bien, c’est une évidence.