Portrait

Rendez-vous avec Jana Mainguet de la Caffinerie

Pour notre portrait du mois, nous avons rencontré Jana Mainguet, torréfactrice à La Caffinerie à Grenoble, spécialisé dans le café de spécialité.

Bonjour Jana, pouvez-vous nous raconter votre parcours ?

J’ai plongé dans l’univers du café de spécialité en 2013 en ouvrant mon propre coffee shop à Paris. À mes débuts, je travaillais avec Café Coutume, puis avec d’autres torréfacteurs au fil du temps. Après cinq années passées dans la capitale, j’ai choisi de poser mes valises à Grenoble parce que j’adore les montagnes et les sports de montagne.
C’est dans la Drôme, chez Kaffa, une petite torréfaction fondée par Antoine Sorez, que j’ai vraiment appris le métier. Là-bas, je touchais à tout : torréfaction, relation clients, formation… Je suis très contente d’avoir travailler avec Antoine parce qu’il a des valeurs fortes et il est très engagé auprès de producteurs. Après un an et demi, la distance étant un frein, j’ai dû tourner la page. J’ai ensuite rejoint La Caffinerie, un projet porté par une entreprise familiale souhaitant se lancer dans le café de spécialité. En 2023, nous avions prévu d’ouvrir une boutique avec un espace torréfaction et restauration, mais un incendie survenu juste avant l’inauguration a bouleversé nos plans. Nous avons alors réorienté notre activité vers le BtoB et collaborons aujourd’hui avec des coffee shops et restaurants de Grenoble. Cela fait maintenant un an et demi que je fais partie de La Caffinerie.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de travailler dans la filière café ?

Quand j’ai ouvert mon coffee shop en 2013, le café de spécialité était encore peu connu. J’ai eu un véritable déclic en le découvrant à La Caféothèque : impossible ensuite d’imaginer servir autre chose ! La collaboration avec Coutume Café m’a aussi profondément marquée, me faisant comprendre que ce métier – du processus de production à la tasse – recèle une richesse infinie à explorer.

Pouvez-vous nous parler de La Caffinerie ?

La Caffinerie a été crée par Cafés FRAICA, une torréfaction familiale implantée à Grenoble depuis 60 ans. Fondée en 1963 par une femme, l’entreprise est aujourd’hui dirigée par ses deux enfants et incarne une ambiance conviviale, presque comme une grande famille. Ce qui m’inspire, c’est leur capacité à se remettre en question et à innover : après des décennies dans le café de commodité, ils ont pris conscience de l’émergence d’un marché de café de spécialité, axé sur plus de transparence, de traçabilité, de qualité et de respect de l’environnement. C’est ainsi qu’est née La Caffinerie, avec une nouvelle équipe. J’ai une grande liberté dans le choix des cafés et les méthodes de torréfaction. De plus, j’ai eu la chance de suivre plusieurs formations l’année dernière, ce dont je suis très reconnaissante.

Comment sélectionnez-vous vos cafés ?

Nous proposons trois gammes: voyageur (la plus classique), explorateur et aventurier (la plus surprenante). Je sélectionne les cafés selon leur profil aromatique mais aussi en tenant compte du travail des producteurs, de l’environnement et des projets de la ferme. L’objectif est de nouer des partenariats durables avec certains producteurs et d’offrir une gamme d’exception qui évolue. Il est important d’avoir une relation de confiance et de transparence avec nos partenaires importateurs, tels que Belco ou Goodsourcing.

Quelle est votre approche en matière de torréfaction ?

Je torréfie chaque café en fonction de son profil aromatique. Certains sont plus adaptés à l’espresso, d’autres au filtre, et parfois aux deux méthodes. Je prends en compte le style et les compétences de chaque client professionnel quand je leur conseil le café. Il y a des baristas qui savent extraire un bon espresso équilibré même avec une torréfaction légère et il y a des restaurants qui ont une clientèle plus classique où il vaut mieux un café chocolaté avec peu d’acidité.

Pour vous, qu’est-ce qu’un bon café ?

Personnellement, je suis fan des cafés du Kenya, surtout lavés et préparés en méthode filtre. Pour moi, un bon café, c’est avant tout un café équilibré, où aucun arôme ou défaut ne prend le dessus. Pour commence la journée, j’apprécie les cafés plus simples, mais propres.

Vous proposez également des formations, pouvez-vous nous en dire plus ?

Nous préparons actuellement des formations destinées aux professionnels du café, pour aider nos clients à monter en compétence ou pour former de nouveaux baristas. Nous envisageons également de proposer, à terme, des formations certifiées par la SCA (Specialty Coffee Association), ainsi que des ateliers ludiques d’environ deux heures et demie pour faire découvrir le café de spécialité au grand public.

Vous avez écrit un livre, “JELEN v PARIZI”. Pouvez-vous nous en parler ?

Oui, j’ai écrit ce livre en slovaque, ma langue maternelle. Il relate mon expérience avec mon coffee shop à Paris. Publié en octobre 2022 par une maison d’édition reconnue en Slovaquie, il a rencontré un franc succès. Le livre est un récit authentique, ponctué d’anecdotes sur mon équipe, mes clients ou diverses situations et vise à montrer que tout est possible si l’on s’en donne les moyens. Pour l’instant, il n’est disponible qu’en Slovaquie.

Quel est votre meilleur souvenir café ?

Je n’ai pas un souvenir unique, mais certains espressos m’ont particulièrement marquée. L’un d’eux était un café du Burundi, produit par Long Miles Coffee, dégusté dans un coffee shop à Vienne – un moment inoubliable tant il était exceptionnel. Un autre espresso, cette fois du Pérou, m’a aussi profondément marquée. Je l’avais goûté chez Brumes (un établissement aujourd’hui fermé), et il était torréfié par Antoine de Kaffa. Ce café était si remarquable que j’ai décidé de le contacter… et c’est ainsi que j’ai commencé à travailler chez lui.

Quels sont vos projets pour La Caffinerie ?

Nous souhaitons renforcer notre visibilité à Grenoble, développer notre clientèle et augmenter nos volumes. Nous allons aussi étendre notre offre de formations. Personnellement, j’aimerais partir dans un pays producteur cette année pour rencontrer un producteur avec lequel nous collaborons et découvrir de près son travail, ses enjeux et le processus de production.

Un dernier mot ?

Il est important de savoir apprécier tous les cafés, pas seulement les plus aromatiques produits par les superstars du marché du café de spécialité. La recherche d’exclusivité ne doit pas nous faire oublier que des cafés simples, équilibrés, propres et naturellement sucrés peuvent eux aussi offrir un immense plaisir à la dégustation.

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